Publié le 26.09.2024
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Entre dérèglement climatique, développement du renouvelable et évolution de nos modes de vie, notre avenir énergétique représente une thématique phare. À la HEIG-VD, elle est au cœur des activités de son nouvel Institut des Énergies. Éclairage avec Mauro Carpita, directeur de l’Institut.

Elle nous permet de communiquer, de nous déplacer, d’échanger : l’énergie constitue l’un des piliers de notre société. Mais ce secteur connaît une révolution, communément désignée sous le terme de « transition ». D’une dépendance aux énergies fossiles, dont nous maîtrisons la production, le transport et la consommation, nous nous dirigeons ainsi vers une électrification.

Basée majoritairement sur le déploiement des énergies propres, renouvelables, intermittentes, cette évolution devrait faire baisser l’émission de gaz à effet de serre. Mais elle s’accompagne aussi de nombreux défis. « Selon une étude de l’Office fédéral de l’énergie (OFEN), la Suisse doit s’attendre à une demande en électricité de 76 térawattheures (TWh) par année d’ici 2050 », explique Mauro Carpita, « En comparaison, nous avons produit environ 67 TWh en 2023, dont 23 TWh à partir des centrales nucléaires, qui sont vouées à s’arrêter. » En d’autres termes, notre pays doit se préparer à combler un manque de 32 TWh par an, soit presque quatre ans de production d’une centrale nucléaire de taille moyenne, ou la consommation de millions de ménages.

L’Institut des Énergies et le rôle des HES

La recherche, le développement des savoirs et le déploiement d’innovations font partie des grandes actions que la Suisse a choisi de mener face à ces enjeux majeurs. Les Hautes Écoles Spécialisées – comme la Haute École Spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO) à laquelle appartient la HEIG-VD – se trouvent au cœur de ces démarches. Dans cette perspective, la HEIG-VD a fondé en juin 2023 l’Institut des Énergies (IE), fusion entre l’Institut de Génie thermique et l’Institut d’Énergie et systèmes électriques. Réunissant environ 65 collaboratrices et collaborateurs, sa mission s’articule sur trois axes : les systèmes électriques, les systèmes thermiques et l’intégration énergétique avec la durabilité.

Au-delà de la recherche scientifique, l’IE réalise aussi des projets en collaboration avec des industriels et PME du secteur, notamment à travers la recherche appliquée & développement (Ra&D). En plus de la Ra&D, l’Institut offre également des prestations de service : « Il nous arrive souvent de développer des outils de A à Z, sur la base de questions de grands gestionnaires du réseau suisse et des différents acteurs du métier », précise le directeur.

Prototypes industriels

L’IE réunit en effet un large panel de compétences et de savoir-faire pour implémenter des solutions innovantes. Les membres du personnel de recherche sont ainsi en mesure de développer des outils d’électronique de puissance ou de nouvelles typologies de chauffage. Mais cet institut dispose aussi de différents laboratoires de test, comme un réseau entièrement malléable, équivalent à une villa, qui permettent de réaliser régulièrement des projets pilotes avec des industriels des réseaux. Et d’autres projets sont en développement.

En 2023, Romande Énergie a donc expérimenté durant une année un nouveau système appelé Soft Open Point (SOP), capable de mieux gérer les variations de tension et de puissance entre deux lignes de distribution. Un projet très technique, et très concret, comme le souligne Mauro Carpita : « Notre institut ne compte pas se cantonner à de la simulation informatique, mais vise à construire un pilote réel, à travers l’accroissement des collaborations entre acteurs privés et institutionnels de la recherche, ainsi qu’avec des technicien·nes du secteur de l’électricité ou de l’énergie ».

« Avec des projets comme le développement de nouveaux onduleurs et l'expérimentation de systèmes de gestion de l'énergie, l'Institut des Énergies se positionne en leader sur le chemin vers un avenir plus durable »
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Mauro Carpita, directeur de l'Institut des Énergies (IE)

Un problème d’onduleurs

La problématique du stockage des énergies renouvelables est souvent citée comme la clé de leur succès. Pourtant, l’IE s’intéresse autant à un autre aspect, moins connu : « La question du stockage est bien évidemment capitale », précise son directeur, « Cependant, celle de l’utilisation des onduleurs est tout aussi primordiale bien que moins popularisée ». L’institut a d’ailleurs obtenu tout récemment le financement d’un projet portant non pas sur les batteries, mais sur l’avenir des onduleurs.

Explication de Mauro Carpita : « Un onduleur est un dispositif qui convertit le courant continu, comme celui produit par des panneaux solaires ou des batteries, en courant alternatif, utilisé par le réseau électrique et nos appareils domestiques. Traditionnellement, la stabilité et la fréquence du courant sont principalement maintenues par des générateurs synchrones, situés dans les centrales à combustibles fossiles ou nucléaires. Ces générateurs fournissent au réseau un cadre de référence constant pour la fréquence et la tension.

Cependant, avec l'essor des sources d'énergie renouvelable intermittentes, comme le solaire et l’éolien, qui n’ont pas de générateurs synchrones, il devient crucial d’assurer cette stabilité d’une autre manière. C'est dans ce contexte que les onduleurs dits "grid-forming" entrent en jeu. Ces appareils ne se contentent pas d'injecter de l'énergie dans le réseau, mais imitent le comportement d'un générateur synchrone en stabilisant activement la fréquence et la tension du réseau. En d'autres termes, ils participent à la création et au maintien de la grille électrique. »

Le projet FORMIDABLE : une innovation prometteuse

Les onduleurs « grid-forming » jouent donc un rôle crucial en permettant à un réseau alimenté en grande partie par des sources renouvelables de continuer à fonctionner de manière fiable indépendamment des fluctuations du réseau électrique. Ces dernières années, des prototypes d'onduleurs conçus pour répondre à ces défis ont vu le jour.

2024 a vu le lancement du projet FORMIDABLE, un partenariat entre l'IE, la HES-SO Valais-Wallis, Groupe E, les Services industriels de Lausanne et la startup Imperix. Ce projet vise à régler les paramètres de ces machines et à développer une nouvelle typologie d'onduleur. L'objectif ultime est de concevoir et de tester des algorithmes permettant la gestion d'un microréseau – ou « microgrid » – comportant plusieurs onduleurs, que ce soit en présence ou en l’absence d'un réseau électrique dominant. Le projet a été largement soutenu, notamment par un financement de l'OFEN.

La société Imperix met à disposition un prototype d’onduleur, qui sera couplé à l’un de ceux produits par les chercheuses, chercheurs et étudiant·es des hautes écoles partenaires. Le tout étant vérifié en première instance sur les réseaux de test de la HEIG-VD, puis secondairement avec Groupe E.

Un projet qui témoigne de l’avant-gardisme de l’IE, mais aussi de son réel intérêt à développer des collaborations avec des entreprises privées et acteurs du secteur.

Vous avez une idée, ou une problématique ? N’hésitez pas, écrivez-nous : secretariat.ie@heig-vd.ch

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